vendredi 7 septembre 2012

Vase Communicant de septembre : Anne Charlotte Chéron

Vases Communicants : c'est chaque premier vendredi du mois. C'est un échange de textes, voire d'images ou de sons, entre deux sites/blogs volontaires. Idée lancée initialement par Tiers Livre  et Scriptopolis.
Les rendez-vous s’opèrent notamment grâce au groupe facebook des vases communicants,  dont Brigitte Célérier est l'âme. Elle administre aussi le blog qui, mensuellement, regroupe tous les participants. (Merci à elle !). (Page précieuse pour ne manquer aucune rencontre vasèsque.)
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J'accueille ici ce mois-ci, plus que volontiers,
Pérec fut choisi comme premier point d'achoppement pour l'écriture commune, avant qu'Anne-Charlotte ne propose comme second support à l'inspiration (riche idée), « 19.10.2004», la photo ci-dessous, par Nikos Markou.

L'eau verte, ma production vasèsque de ce mois-ci, est donc lisible chez elle,
en suivant ce lien.
 
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Hésite entre ciel, terre et mer. Le point de bascule, quand.
“Au début, on ne peut qu'essayer de nommer les choses, une à une, platement, les énumérer,
les dénombrer, de la manière la plus banale possible, de la manière la plus précise possible, en
essayant de ne rien oublier.”1
De la mer, je connais les marées, courants, caprices, tempêtes, seiches, sautes, mouvements
et revirements d’humeur, le fond, clapotis, la colonne, salinité, surface, houle, l’ondulation,
De la Morte : rien.
Quelques détroits, bras.
Me suis largement enfilée la Manche (mauvais jeu de mot : faible, sans effort)
On ne m’y a pas donné goût. Boude la mer. Faire le choix des montagnes.
Elle ne paraît pas s’amouracher de “ses gens”, ni de ses hommes, concurrence les lopins de
terre et prend de l’assurance sur les continents. Devrait-on s’inquièter de ses imprudences ?

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De l’horizon, je ne sais rien : bouché.
On me parle de voyages que je ne fais pas. Déception d’usage : on peut être sans frontières - à
regret - à domicile.
Futur déjà craquelé : vieille coque échouée victime d’osmose.
Trop grande étanchéité entre le quotidien et l’écriture. Où se trouve le temps des mots ? Où
trouvent-ils le temps des mots ?
Mettre en ordre des notes. Classer les brouillons sans émettre de jugement, se contenter de les
ranger. Ne pas relire. Ne pas se regarder. Dehors, ça crie, ça pleure. Le soleil tape sur le bras.
Déjà jeudi. Trop vite.
Faire le deuil de la longueur. La Poésie du peu doit défier et mater la prolixité.
Il faut être décroissant dans le choix des mots et rendre la langue précieuse.
Barbara Loden déclarait “qu’il est facile d’être d’avant-garde mais qu’il est vraiment difficile de
bien raconter une histoire simple .”2
Fuir la tentation de la forme creuse, le jeu fainéant de l’art pour l’art. Au secours l’Oulipo : il y a
trop de travail pour arriver là. Aveu d’échec.

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Ne sais que dire de ce coquillage écrasé, coincé entre ciel et mer. Tel fût, pourrait-on dire, le
projet de notre échange.
Il y a, à côté : des dilemmes trop prosaïques. Immobilisée comme cette vielle coque rouillée.
Trouver du temps au temps pour travailler, gagner sa vie, se changer les idées, travailler pour
soi, se reposer, gérer ses affaires personnelles, oublier le quotidien, les idées, le travail, se
reposer.
Des discussions en pagaille. Des paroles par milliers. Pas d’énergie pour trier. Tout contenir à
défaut de mieux.
Souvent : chacun parle, personne n’écoute. Le quotidien et le bout des conversations
s’entendent mal.

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Refus ou incapacité du “faire lyrique”. Pas de poésie maritime, marine.
Ici, c’est court, simple. Que faire de la longueur ?
"Je sens de plus en plus que seul un grand roman réussit à exprimer les multiples dimensions
de l'expérience humaine, les vies subjectives intérieures, les comportements dans une société,
une histoire, un monde, tout en posant, soit par la bouches des personnages, soit sous la plume
de l'auteur, soit même implicitement, les problèmes de la destinée humaine."3
Parce que seul un grand roman pourrait et devrait changer les choses.

1 Georges Perec et Robert Bober, Récits d’Ellis Island : histoires d’errance et d’espoir
2 Nathalie Léger, Supplément à la vie de Barbara Loden 
3 Egdar Morin, Mes démons
Photo : Nikos Markou, « 19.10.2004», 2004, 119 X 150 cm, courtesy: AD Gallery, Athens, Greece  

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